Par Étienne Augris, professeur d'histoire-géorgraphie
Jusque dans les années 1990, l’économie nord-coréenne fonctionne sur le modèle communiste, avec une planification et une collectivisation totale. L’approvisionnement des habitants est assuré exclusivement par l’État. Le pays connaît de profonds bouleversements économiques avec la fin de l’aide soviétique puis la famine des années 1990. Une économie parallèle – faisant appel aux règles honnies du marché – émerge, tolérée par l’État qui ne peut plus assurer la distribution des produits. Kim Jong-il se résout à des « ajustements » (le mot réforme n’a pas bonne presse…) en 2002 avec la monétarisation et la légalisation des marchés. Les pénuries facilitent également l’approvisionnement à l’extérieur. Les tentatives d’ouvertures se heurtent toutefois au raidissement américain sur la politique nucléaire depuis 2002, et à la fi n de la politique de rapprochement du Sud (politique dite du « rayon de soleil ») en 2008.
Une économie hybride se développe depuis, conservant un rôle important à l’État, au parti et à l’armée (au risque de la corruption…) mais s’appuyant sur une nouvelle classe d’entrepreneurs. Échoppes au coin des rues, vendeurs indépendants et marchés se multiplient dans une économie de plus en plus concurrentielle où les devises étrangères prolifèrent. Si 80 % des biens de consommation viennent de Chine, le régime promeut leur remplacement par des productions locales. Une société de consommation se développe, en particulier à Pyongyang en pleine transformation. Des dizaines de nouveaux bâtiments, dont des centres commerciaux, sortent de terre et les avenues se remplissent de voitures.
Il en résulte une croissance réelle, de 3,9 % en 2016. Et ce même si le PIB par habitant reste faible, équivalent à seulement 4,6 % de celui de la Corée du Sud… Globalement, l’activité économique se partage entre l’agriculture (21 % du PIB), l’industrie et les mines (33 %), la construction (9 %) et les services (32 %). Les atouts du pays sont sa main-d’oeuvre bon marché et qualifiée ainsi que la richesse des matières premières (minerais et terres rares).
Inspirées par la réussite chinoise, des zones économiques spéciales ont été créées dès les années 1990 pour attirer les capitaux russes, chinois, et sud-coréens. Kim Jong-un a récemment multiplié ces zones dans toutes les régions. Créée dès 1991, la zone économique spéciale de Rason, située à proximité de la frontière avec la Russie et la Chine a ainsi bénéficié des projets chinois et russes de redynamisation de ces périphéries de leur territoire, leur offrant notamment un port libre de glace. Depuis 2010, celui-ci a été étendu et relié aux réseaux terrestres des deux pays. Les investissements étrangers y sont en augmentation.
Créé en 2000 dans le cadre de la politique du « rayon de soleil » de la Corée du Sud, le complexe de Kaesong, situé au nord de la zone démilitarisée (DMZ), fonctionnait, lui, comme une zone économique spéciale pouvant accueillir des sociétés étrangères. Accueillant jusqu’à 120 entreprises du Sud (dont Hyundai) et employant 54 000 Nord-Coréens à son maximum, le complexe exportait vers le Sud des produits transformés à partir de matières premières et composants importés du Sud (textile, semiconducteurs et pièces automobiles). Les salaires étant versés directement au régime nord-coréen, le complexe a été fermé par le gouvernement du Sud en février 2016, pour ne pas financer les programmes d’armement du Nord. Les sanctions internationales adoptées depuis 2016 sont un vrai risque pour la croissance nord-coréenne. La plupart des produits exportés, à commencer par le charbon, sont touchés
Avec plus de 100 000 visiteurs par an dont 90 % de Chinois et 5 000 Occidentaux, le tourisme aurait généré 40 millions de dollars de recettes en 2015. Sous l’impulsion de Kim Jung-un, de nouveaux sites ont été développés comme celui de Masikryong, station de ski de luxe taillée surmesure pour accueillir les étrangers… et leurs devises. Des zones spéciales ont été créées à des fi ns touristiques dans le cadre du rapprochement avec le Sud. La zone du mont Kumgang, gérée par Hyundai, a ainsi accueilli près de 2 millions de Sud-Coréens entre 1998 et 2008 avant qu’une touriste, s’étant écartée du chemin, soit… abattue par des gardes nord-coréens. L’essor du tourisme est, ici comme ailleurs, clairement lié à l’amélioration du climat politique. Le pays compte deux sites classés par l’UNESCO : l’ensemble des tombes de Koguryo et les monuments et sites historiques de Kaesong. Cinq autres sites sont pressentis.
Plus de 80 % du commerce extérieur, qui est déficitaire, est aujourd’hui réalisé avec la Chine. Avant la fermeture du complexe de Kaesong, le commerce avec la Corée du Sud était en expansion. Loin derrière viennent l’Inde et la Russie (pour les importations). Le pays exporte surtout des minerais (charbon), du textile, de la viande et des produits de la mer. Pétrole et produits manufacturés constituent l’essentiel des importations.
Jusque dans les années 1990, l’économie nord-coréenne fonctionne sur le modèle communiste, avec une planification et une collectivisation totale. L’approvisionnement des habitants est assuré exclusivement par l’État. Le pays connaît de profonds bouleversements économiques avec la fin de l’aide soviétique puis la famine des années 1990. Une économie parallèle – faisant appel aux règles honnies du marché – émerge, tolérée par l’État qui ne peut plus assurer la distribution des produits. Kim Jong-il se résout à des « ajustements » (le mot réforme n’a pas bonne presse…) en 2002 avec la monétarisation et la légalisation des marchés. Les pénuries facilitent également l’approvisionnement à l’extérieur. Les tentatives d’ouvertures se heurtent toutefois au raidissement américain sur la politique nucléaire depuis 2002, et à la fi n de la politique de rapprochement du Sud (politique dite du « rayon de soleil ») en 2008.
Pyongyang en pleine transformation
Une économie hybride se développe depuis, conservant un rôle important à l’État, au parti et à l’armée (au risque de la corruption…) mais s’appuyant sur une nouvelle classe d’entrepreneurs. Échoppes au coin des rues, vendeurs indépendants et marchés se multiplient dans une économie de plus en plus concurrentielle où les devises étrangères prolifèrent. Si 80 % des biens de consommation viennent de Chine, le régime promeut leur remplacement par des productions locales. Une société de consommation se développe, en particulier à Pyongyang en pleine transformation. Des dizaines de nouveaux bâtiments, dont des centres commerciaux, sortent de terre et les avenues se remplissent de voitures.
Il en résulte une croissance réelle, de 3,9 % en 2016. Et ce même si le PIB par habitant reste faible, équivalent à seulement 4,6 % de celui de la Corée du Sud… Globalement, l’activité économique se partage entre l’agriculture (21 % du PIB), l’industrie et les mines (33 %), la construction (9 %) et les services (32 %). Les atouts du pays sont sa main-d’oeuvre bon marché et qualifiée ainsi que la richesse des matières premières (minerais et terres rares).
Inspirées par la réussite chinoise, des zones économiques spéciales ont été créées dès les années 1990 pour attirer les capitaux russes, chinois, et sud-coréens. Kim Jong-un a récemment multiplié ces zones dans toutes les régions. Créée dès 1991, la zone économique spéciale de Rason, située à proximité de la frontière avec la Russie et la Chine a ainsi bénéficié des projets chinois et russes de redynamisation de ces périphéries de leur territoire, leur offrant notamment un port libre de glace. Depuis 2010, celui-ci a été étendu et relié aux réseaux terrestres des deux pays. Les investissements étrangers y sont en augmentation.
Créé en 2000 dans le cadre de la politique du « rayon de soleil » de la Corée du Sud, le complexe de Kaesong, situé au nord de la zone démilitarisée (DMZ), fonctionnait, lui, comme une zone économique spéciale pouvant accueillir des sociétés étrangères. Accueillant jusqu’à 120 entreprises du Sud (dont Hyundai) et employant 54 000 Nord-Coréens à son maximum, le complexe exportait vers le Sud des produits transformés à partir de matières premières et composants importés du Sud (textile, semiconducteurs et pièces automobiles). Les salaires étant versés directement au régime nord-coréen, le complexe a été fermé par le gouvernement du Sud en février 2016, pour ne pas financer les programmes d’armement du Nord. Les sanctions internationales adoptées depuis 2016 sont un vrai risque pour la croissance nord-coréenne. La plupart des produits exportés, à commencer par le charbon, sont touchés
Un pays ouvert au tourisme ?
Avec plus de 100 000 visiteurs par an dont 90 % de Chinois et 5 000 Occidentaux, le tourisme aurait généré 40 millions de dollars de recettes en 2015. Sous l’impulsion de Kim Jung-un, de nouveaux sites ont été développés comme celui de Masikryong, station de ski de luxe taillée surmesure pour accueillir les étrangers… et leurs devises. Des zones spéciales ont été créées à des fi ns touristiques dans le cadre du rapprochement avec le Sud. La zone du mont Kumgang, gérée par Hyundai, a ainsi accueilli près de 2 millions de Sud-Coréens entre 1998 et 2008 avant qu’une touriste, s’étant écartée du chemin, soit… abattue par des gardes nord-coréens. L’essor du tourisme est, ici comme ailleurs, clairement lié à l’amélioration du climat politique. Le pays compte deux sites classés par l’UNESCO : l’ensemble des tombes de Koguryo et les monuments et sites historiques de Kaesong. Cinq autres sites sont pressentis.
Des liens quasi exclusifs avec la Chine
Plus de 80 % du commerce extérieur, qui est déficitaire, est aujourd’hui réalisé avec la Chine. Avant la fermeture du complexe de Kaesong, le commerce avec la Corée du Sud était en expansion. Loin derrière viennent l’Inde et la Russie (pour les importations). Le pays exporte surtout des minerais (charbon), du textile, de la viande et des produits de la mer. Pétrole et produits manufacturés constituent l’essentiel des importations.